Si loin, si proches

Ancrée depuis sa création en 2000 dans le quartier Franc-Moisin à Saint-Denis (93), l’association Arts 93 Communique/Compagnie Élolonguè accompagne des jeunes des quartiers prioritaires vers la réussite à travers une pluralité d’actions artistiques et éducatives qui valorisent la culture hip-hop sous toutes ses formes. La démarche vise à « donner des ailes aux talents à venir », en aidant les jeunes à libérer leur potentiel, à révéler leurs compétences et à prendre confiance en eux pour construire leur avenir en se positionnant comme auteurs de leur vie, au-delà des difficultés et des stéréotypes. Les projets sont menés en partenariat les acteurs publics, associatifs et les habitants des territoires concernés. C’est le cas notamment de Corres’Pont’Danse, une initiative axée sur l’illettrisme et l’illectronisme lancée au lendemain de la pandémie de covid-19, qui a mis en lumière le caractère critique de l’accès au numérique.

Le projet Corres’Pont’Danse s’inscrit dans une démarche de coopération culturelle entre des élèves scolarisés dans des quartiers prioritaires en France et dans des zones rurales au Cameroun. Le support de la rencontre étant une correspondance nouée entre ces jeunes vivant dans des pays et des environnements quotidiens différents. L’association s’est adressée à la Fondation Transdev pour mettre en place le volet français de cette action qui se développe sur le temps long, avec trois étapes conçues pour amener les jeunes participants à s’ouvrir progressivement au champ des possibles. Dans un premier temps, les élèves sont invités à suivre des ateliers d’écriture afin de pouvoir correspondre avec leurs interlocuteurs africains, via la rédaction de lettres autour des thèmes de la vie quotidienne, du voyage et de la rencontre des cultures. En vue de poursuivre cet échange épistolaire par courriels, ils participent ensuite à des ateliers numériques où ils apprennent à utiliser les outils digitaux mais aussi à maîtriser les bases d’une communication en ligne sécurisée. Cette formation au numérique comprend une initiation à la motion capture, une technique utilisée dans le cinéma ou les jeux vidéo pour créer des images de synthèse en enregistrant sur ordinateur les mouvements d’une personne équipée de capteurs. Le troisième temps est celui des ateliers chorégraphiques : les jeunes font appel à la danse pour exprimer et valoriser l’expérience qu’ils ont vécue. Chaque classe impliquée dans le projet est amenée à faire sa propre création artistique avec l’objectif à terme d’une restitution auprès des élèves des autres établissements.

Une aide de 8000 €, fléchée notamment sur l’organisation de l’atelier chorégraphique, a concrétisé en 2023 l’appui de la Fondation à un projet riche de nombreuses dimensions. Corres’Pont’Danse contribue à lever chez les jeunes participants les freins à l’expression et plus particulièrement les barrières liées au passage à l’écrit, il leur donne des outils et des opportunités d’épanouissement, les encourage à l’autonomie et à exercer leur pouvoir d’agir. C’est aussi pour eux une formidable invitation à l’ouverture d’esprit, grâce à des échanges directs — bien qu’à distance — qui permettent de déconstruire les stéréotypes sur l’ « étranger » en découvrant d’autres cultures et d’autres réalités vécues. Le développement des compétences numériques est un levier essentiel : si ces outils créent des possibles, en facilitant l’accès à l’information et les rencontres à la vitesse de la lumière, ils participent aussi à creuser les fractures sociales lorsqu’on ne les maîtrise pas ou que l’accès en est limité. La sensibilisation à la cybersécurité et à la lutte contre le cyberharcèlement est également un enjeu majeur, particulièrement auprès de jeunes qui, bien souvent, ne connaissent le numérique qu’à travers les jeux et les réseaux sociaux.